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Les droits des femmes et l'égalité de rémunération pour un travail égal étaient déjà en 1893 l'objet de vifs débats internationaux, et une femme belge y joua un rôle de premier plan.

Congrès de Zurich, troisième à partir de la gauche, la féministe allemande Clara Zetkin, à côté de Friedrich Engels (photo Wikipedia)

C'est une belle journée d'été à Zurich, à la mi-août 1893. Le mouvement socialiste s'est réuni pour un grand congrès international . La tâche n'était pas aisée à l'époque ; le mouvement socialiste était encore jeune. Un Parti ouvrier belge (PVB) avait été fondé en Belgique quelques années plus tôt, en 1885, et une forte délégation nationale de dix-sept participants s'était rendue en Suisse, conduite par le jeune Émile Vandervelde.

Emilie Claeys en compagnie de son amie et militante Nellie van Kol, originaire des Pays-Bas.

Lors du congrès de Zurich, les socialistes ont présenté une liste de revendications concernant les droits des femmes. Une commission sera constituée et un rapport contenant huit revendications sera rédigé. L'inspiration s'inspire des récentes mesures sociales visant à protéger le travail des enfants. Ils exigent également que le gouvernement impose des restrictions protectrices aux femmes : un maximum de huit heures par jour, l'interdiction du travail de nuit, l'interdiction des emplois dans des industries dangereuses ou polluantes, un congé maternité de six semaines, etc.

Ça a l'air bien. La déléguée allemande Luise Kautsky présente fièrement son rapport et soumet la liste des revendications au vote du congrès . Tout le monde est d'accord ? Soudain, la délégation belge lève la main. Emilie Claeys a quelque chose à dire.

Emilie Claeys est une fervente socialiste, mais une féministe encore plus énergique. Pour elle, les droits des travailleuses sont primordiaux. Ayant elle-même travaillé en usine, elle sait de quoi elle parle. Et cela détonne. Claeys est très pragmatique. La protection sociale, c'est bien beau, mais cela signifie que le travail des femmes deviendra plus cher sur le marché du travail. Les patrons d'usine seront alors plus enclins à embaucher des hommes, et certaines femmes perdront leur emploi.

Avant d'imposer des mesures restrictives de protection du travail féminin, le gouvernement doit veiller à ce que les femmes ne perdent pas leur compétitivité sur le marché du travail. C'est l'approche pragmatique de Claeys : les femmes ne doivent pas être protégées comme des enfants sans défense ; il faut leur donner les moyens de lutter pour leurs droits sur un pied d'égalité.

Il y a un argument à faire valoir. Le Congrès débat poliment des arguments, mais les voit rapidement rejetés à l'unanimité. Les femmes ont effectivement besoin de protection à l'usine, affirme-t-on, car sinon, comment auraient-elles le temps de remplir leur rôle de mère au foyer ? Le féminisme radical de Claeys est très en avance sur son temps.

Le même phénomène se produisit en Belgique, où Claeys gâcha quelque peu les célébrations entourant l'obtention du suffrage universel (pluriel) en répétant à plusieurs reprises qu'il s'agissait du suffrage universel masculin. Claeys mourut en 1943, et ce n'est qu'en 1948 que le suffrage universel féminin fut instauré en Belgique. Elle ne vécut pas assez longtemps pour le voir.

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Emilie Claeys, Gand ca. 1909 (photo Amsab-ISG)